Vallejo_Cariola_Frankfurt_2012_01.jpgDeux jeunes communistes, figures du mouvement étudiant, élues au Chili avec huit députés du PC : une première depuis 1973

 

Article AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

 

(à partir de l'article déjà publié sur http://jeunescommunistes-paris15.over-blog.com/)

 

 

Ce week-end avaient lieu les élections législatives et présidentielles au Chili. Elles devraient voir l'élection sans surprise de la socialiste Michelle Bachelet, entre espoirs et doutes. Elles ont aussi permis l'élection de huit députés communistes, une première depuis 1973.

 

Après trois ans de la domination de la droite ultra-libérale et pro-américaine de Pinera, trois ans de manifestations massives pour le droit à l'éducation et la nationalisation des ressources naturelles, la défaite de cette réaction nostalgique du « pinochisme » sonne comme un soulagement.

 

La victoire de la coalition « Nouvelle majorité » (Nueva mayoria) suscite un espoir d'une vraie rupture avec l'héritage de la dictature, mais incite à la prudence face à une coalition hétérogène.

 

En effet, cette coalition constitue un élargissement du « pacte de la Concertacion », une alliance de centre-gauche entre Parti démocrate-chrétien et Parti socialiste, qui a gouverné entre 1990 et 2009 sans transformer le pays, encore basé sur l'héritage libéral et autoritaire de Pinochet.

 

Pour les communistes, le soutien à la candidature de Bachelet part du pari de la transformation sociale un pied dans les institutions, un pied dans les luttes. La référence à l' « Unité populaire » de Salvador Allende, assassinée en 1973, reste en ce sens prégnante bien qu'ambivalente.

 

Concrètement, le Parti communiste chilien (PCCh) peut compter sur son travail dans la rue depuis trois ans, à l'avant-garde du mouvement étudiant, au cœur du mouvement ouvrier – notamment des mineurs – reprenant la tête de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), désormais dirigée par la communiste Barbara Figueroa.

 

Il pourra désormais aussi compter sur une représentation élargie au Parlement, avec huit députés communistes, cinq de plus qu'en 2009, la plus forte représentation parlementaire depuis 1973 où le PCCh comptait 25 députés.

 

Parmi ces députés, deux militantes de la Jeunesse communiste, deux figures du mouvement étudiant de 2011 : Karol Cariola, secrétaire de la JC chilienne, étudiante en médecine, 26 ans.

 

Et Camilla Vallejo bien sûr, 25 ans, étudiante en géographie, ancienne vice-présidente de la Fédération des étudiants de l'Université du Chili (FECh) et, pour beaucoup, icône du mouvement étudiant de lutte pour une éducation publique.

 

Les deux jeunes femmes ont su porter une voix combative et de rassemblement – reprenant le mot d'ordre national « Vote en confiance, vote communiste ! » - devançant dans leurs circonscriptions les candidats de droite mais aussi leurs partenaires de la coalition de centre-gauche.

 

ol-cariola.jpgKarol Cariola est arrivée en tête dans le district d'Independencia (banlieue de Santiago) avec 38,4 % des voix tandis qu'à La Florida, toujours dans la banlieue de Santiago, Camila Vallejo est arrivée également première avec 43,8 % des voix.

 

Ce succès peut être salué, il suscite un grand espoir de changement, celui porté par le mouvement de 2011 qui a fait descendre des centaines de milliers d'étudiants, lycéens, travailleurs dans la rue.

 

Celui d'une véritable réforme de l'éducation qui conduise à l'affirmation d'une éducation 100 % publique, gratuite et la fin du système privatisé chilien, sur le modèle américain.

 

Il n'exonère pas d'un regard critique, celui que portent nombre d'étudiants, de jeunes travailleurs qui ont participé aux manifestations depuis 2011, mais aussi de la part des militants chevronnés qui étaient là en 2006 contre la politique libérale de … Bachelet, déjà.

 

On se souvient de la « révolution pingouine » de 2006, du nom de l'uniforme des lycéens chiliens. A l'époque, les lycéens et étudiants luttaient contre le statu quo dans la privatisation de l'éducation et la hausse des frais de scolarité cautionnée par le gouvernement de centre-gauche de Bachelet.

 

Bachelet n'avait lâché que des miettes, les frais de scolarité ont continué à augmenter, les taux d'intérêts à grimper, l'éducation privée à se développer. En 2008, son ministre est même tombé sur la question des subventions aux établissements privés.

 

En trois ans de présidence Bachelet, vingt ans de gouvernement de la « Concertacion » (démocrate-chrétien et socialiste), l'éducation de Pinochet continue d'être en vigueur au Chili : municipalisation des écoles, autonomie des universités, éducation de classe et privatisation omniprésente.

 

camila vallejoCamila Vallejo ne s'est pas privée de critiquer Michelle Bachelet, son passé et son programme actuel, qui repose sur un flou artistique. Une « réforme de l'éducation » qui reviendrait sur certains aspects de l'éducation privatisée … sans opter pour une éducation 100 % publique.

 

Vallejo avait affirmé en 2012 qu'elle « ne ferait pas campagne pour Bachelet, ni n'appelerait les jeunes à voter pour elle », s'affrontant y compris avec la vieille garde du Parti communiste.

 

Depuis, face à l'escalade des promesses de la candidate et la dynamique des alliances à gauche, elle a dû changer de discours. Seul le temps nous dira si les espoirs de changement placés en Michelle Bachelet seront porteurs d'un réelle transformation sociale.

 

Entre-temps, comme toujours, c'est avant tout dans la rue plus que dans les palais ministériels que l'avenir du Chili se décidera.

 

Pour les étudiants, lycéens, jeunes travailleurs, c'est ici que se jouera l'alternative : avec un appui institutionnel des députés communistes dont Camilla et Karol, mais surtout fort de la majorité de 80 % de la population favorable à une éducation 100 % publique !

 

 

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